mercredi 25 mai 2016

surréalisme

début d'un texte de mes élèves - en avance sur l'écriture du temps :
"un jour, la nuit, je..."
encore un à qui je vais devoir expliquer que seul le génie, la reconnaissance et la célébrité autorisent de telles licences poétiques, mais qu'à lui autant qu'à moi - comme les associations de breton parurent fascinantes et celles de mon père le conduisirent à l'asile - elles sont farouchement interdites pour l'équilibre du monde et la paix civile...

mardi 24 mai 2016

son destin en main

on me prête un livre de laurent gounelle - pourquoi ainsi m'agresser - je prends avec suspicion l'ouvrage et lis la quatrième de couverture (titre d'un mien ouvrage resté au rebut) où l'on annonce que : "plus qu'un roman, une réflexion sur soi-même qui nous invite notre destin en main." - phrase qui a elle seule fait monter en moi des envies d'autodafé -
vivant depuis quelques années dans des pays qu'on qualifierait volontiers de "fatalistes" - jacques défends-moi - admirateur des tragiques grecs - je crois au final être moins agacé par la résignation que par le mensonge de "la prise en main de son destin" - diktat fait au citoyen lambda (moi), asséné à coups de marteau par ceux qui mesurent leur réussite et veulent la comparer à celles des autres pour leur montrer qui a la plus grosse - comme à l'adolescence on se mesure autre chose - thème d'un prochain post dédié à benjamin p*** de grrrrrr - 
double destin de la réussite : providentiel au départ ("si tu es resté dans ta misère c'est que dieu l'a voulu, il n'y a rien à faire" - vision protestante des débuts du capitalisme, dont on oublie souvent la justification religieuse) - qui cède sa place à celui d'une espèce de surhomme autoproclamé, costard la semaine et survêt le week-end ("j'ai pris mon destin en main, je l'ai domestiqué, plié - je suis un modèle pour le monde") : vision somme toute risible après avoir lu oedipe roi ou philoctète -
le fatalisme est sûrement critiquable, il sent meilleur que l'arrogance triomphante dont seuls devraient se prévaloir les insectes nécrophages - quant à laisser le destin loin de son existence, il semble que même l'homo dominandus ait dû mal à s'y résigner...

lundi 23 mai 2016

une autre petite mort de pessoa

les citations ont bon dos - centre commercial d'almazar, marrakech - entre les boutiques de fringues et les snacks mauvais marché naissent d'improbables espaces artistico-culturels, une galerie et une salle de conférence -
sur la vitrine d'icelle, une citation de l'immense poète portugais : "je lis car la vie ne suffit pas."
je sens poindre une petite turgescence, il faut que je pénètre les lieux sans attendre, avec douceur et suavité, sans précipitation. je m'approche des rayons et je me rends compte le charme s'est amolli, rompu avant l'extase - les livres sont de marc lévy, katherine pancol, guillaume musso - ces réducteurs de livre et de nos têtes paresseuses... pessoa n'a pas fait le poids, il s'en allé, aussi penaud qu'ivre -
je me retire penaud et desséché - j'avais tant cru pouvoir aimer...

lundi 9 mai 2016

destin commun

assistant à une conversation avec edgar morin lors d'un congrès - il y aurait des choses à dire sur la leçon numéro 1 mais là n'est pas le propos - il conclut que notre futur, cette grande inconnue, est notre aventure commune, notre destin commun, l'aventure que nous sommes en train d'écrire - on se demande qui l'écrit d'ailleurs  -
et de me rappeler vaguement ce que j'écrivais hier dans un de mes inutiles carnets : quelle raison valable (= quel odieux hasard) y aurait-il (dans le grand plan avec un p majuscule) que nous durions plus longtemps que les trilobites, les ammonites ou les grands dinosaures ?

midi

difficile de dire quel midi il sera lorsque nous nous éveillerons...

de la diplomatie

la raison quotidienne s'écrase contre la raison diplomatique - et tout vole en éclats, se fracasse, avec la pudeur de la médiocrité, pour sauver les pleutres apparences et quelques intérêts aussi privés et mesquins que ceux de la raison quotidienne ...

mort lente

comment ne pas être ému jusqu'aux larmes, quittant mon père dans le cancer brouillé et flou de la maladie d'alzheimer qui rogne son esprit et son existence, le quittant dans la conscience de son inconscience qui avançait et sachant que, à notre prochaine rencontre, il n'aurait plus conscience de qui je suis, par ces lignes du zibaldone di pensieri de leopardi :
“voir mourir une personne aimée est toujours moins déchirant que d’être le témoin de son dépérissement, d’une maladie (ou toute autre chose) qui altère son corps ou son esprit. pourquoi ? parce que dans le premier cas, nos illusions demeurent, dans le second, elles s’évanouissent s’annulent tout à fait et nous sont arrachées avec force. après la mort, la personne aimée subsiste encore dans notre imagination telle qu’elle était, telle que nous l’aimions jadis. mais dans l’autre cas, la personne aimée se perd tout à fait, une autre se substitue à elle, et celle d’avant, que l’on aimait et que l’on chérissait, ne peut plus subsister, pas même par la force d'une illusion ; car la présence de la réalité et de cette même personne transformée par une maladie chronique, ou par la folie, par la corruption des moeurs, etc., nous détrompe violemment et cruellement : la perte de l'objet aimé n'est ainsi plus compensée par l'imagination. ni par le désespoir ou le repos qui accompagne une douleur excessive, comme après une mort. cette perte est telle que ni la pensée ni le sentiment ne peuvent s'abandonner. cette perte ne sera donc jamais qu'une douleur très cruelle."