jeudi 31 octobre 2013

époque

je crois avoir compris ce qui m'agaçait autant dans mon époque [et mes contemporains] : son ignorance des choses passées et son nombrilisme la persuadent qu'elle a tout inventé.

mercredi 30 octobre 2013

signe intéreur de vieillesse

celui-ci est dû à frank margerin, dans le souvenir d'une de ses bd - était bananes métalliques ? - alors que les quatre compères sautent par-dessus le portique du métro, l'un d'eux - gillou ? - se gaufre et s'étale sous le regard du personnage moustachu bourgeois qui s'enthousiasme en criant "bien fait !!!" - 
nous sommes devenus vieux le jour où nous avons pensé, en voyant un misérable ou un voyou ou un déclassé ou un gitan ne pas réussir son minable forfait - forfait minable car sans conséquence souvent mais dénoncé "pour le principe" - et se dire en ricanant "bien fait" - je puis vous assurer qu'à ce tarif bon nombre sont déjà vieux avant l'adolescence...

lundi 28 octobre 2013

inutilité

comme je disais à un ami pour le réconforter :
"tu sais, tu n'es pas plus inutile qu'un autre..."

mercredi 23 octobre 2013

modernité

la paresse était considérée comme un péché - dans la mesure où le moine prenait sur le temps qu'il devait consacrer à dieu - nous sommes dans l'absolu, qu'on y croit ou non, il y a somme toute une certaine logique dans la conception médiévale - 
à partir de l'époque moderne, qui se fout de dieu, la paresse, ramenée à des fins utilitaristes, devient un vice, un péché, non contre dieu, mais contre les hommes, les dirigeants : elle empiète à présent sur le temps humain, sur le temps de la production - là, cela devient sérieux, cela ne fait plus rire : on se fiche du péché, mais on pardonne difficilement le vice et l'amoralité -
voilà un subtil coup d'état de la société civile, qui s'accapare le droit de gérer notre temps personnel et de jeter l'opprobre à ceux qui flânent ?

dimanche 20 octobre 2013

sérieux

s'il existe un endroit où il faut faire preuve de sérieux et d'où le rire est banni, ce n'est plus l'école, ce n'est plus l'église, c'est le musée, c'est la galerie d'art - attention, c'est du sérieux, c'est de l'art, on fronce le sourcil d'un air connaisseur, on apprécie et éventuellement on s'enthousiasme, on écoute d'une oreille méprisante les commentaires des autres, toujours si plats - on apprécie encore en hochant la tête, on concentre son attention non pour mieux y voir mais pour mieux montrer que nous, on regarde - hochement de tête entendu, froncement de sourcils, hauteur - on ne badine moins avec l'art qu'avec dieu...

jeudi 17 octobre 2013

signe extérieur de vieillesse

et encore on n'a pas autopsié mon foie et mes poumons...
je lisais récemment l'article (élogieux) de monsieur assouline [qui a plus de huit lecteurs, lui, le salaud !] à propos de france culture et j'y notai avec un certain désagrément : 
"cela dit, l'âge moyen de l'auditeur est de 54 ans"
comme un coup de poignard dans mes ridules et mes cheveux grisons - j'avais bien conscience de n'appartenir point au monde des jeunes, des vingtenaires, mais me propulser sans m'avertir dans celui des cinquantenaires bien murs....


http://larepubliquedeslivres.com/le-premier-demi-siecle-de-france-culture/ 


mercredi 16 octobre 2013

the belly of an architect (badinerie)

un ami architecte me parlait hier des lubies de certains richissimes personnages qui illuminent marrakech de leur indispensable présence ; ainsi monsieur r***, qui a fait construire pour ses 64 ans un jeu d'échecs grandeur nature - on ne nous dit pas s'il paye quotidiennement soixante-quatre figurants pour les pièces - puis pour ses soixante-sept ans une piscine de soixante-sept mètres de long (il eût pu, pour faire chic et pour aller jusqu'au bout du nombre, prendre des maçons bas-rhinois) - on redoute déjà dans toute la palmeraie l'idée qui en lui germera pour son soixante neuvième anniversaire...

juste retour des choses

nous nous gaussons fort lorsque nous entendons des discours du passé : comment, nous disons-nous, les gens de l'époque purent-ils croire à ces grossières propagandes, à ces claires manipulations ? nous n'eussions pas été dupes, nous, tout comme nous eussions tous été résistants - quel malheur pour le monde que notre tardive naissance -
malgré les investigations si pénétrantes du petit journal qui plaît tant aux demi-habiles de blaise, nous avalons quotidiennement des bassines de foutre sans dresser l'oreille mais au contraire en détendant notre rectum - il est donc probable que les générations futures auront elles aussi de quoi se moquer de nous et de tomber des nues comme nous le faisons -
il est encore plus probable - en raison de l'horizontalité vertigineuse - qu'elles se soucieront de nous autant que nous des hommes de cro-magnon et qu'elle préfèreront se caresser le nombril plutôt que d'éviter de commettre nos erreurs...

dimanche 13 octobre 2013

sur la lecture

notre exigence de lecteur accouplée à notre expérience d'écrivain raté font que nous ne supportons que la lecture de livres que nous eussions aimé écrire et, contrairement à ce que croient les gens du monde et la grande masse des demi-habiles, nous ne sommes pas jaloux des succès des écrivains à la mode ou des auteurs commerciaux - eux existent à peine pour nous et nous râlons de voir la place qu'ils prennent pour rien presque - 
si nous envions quelque chose, c'est le talent ou le génie des  auteurs, morts ou vivants, qui continuent de bouleverser notre vie et de nous donner les coups de hache dont parle kafka - et d'ailleurs cette jalousie n'existe qu'à peine, subjugué que nous sommes par le bonheur tremblant de notre lecture...

pourquoi utilisé-je le nous pour dire je ?...

vendredi 11 octobre 2013

le fumeur et le bichon

dans notre société d'abondance où il va mieux être un chien de race qu'un homme sans destin - ou pire, qu'un fumeur avec un semblant de petit destin - à tous les fumeurs qui sont de bien grands pécheurs - à tous les défenseurs de bêtes à poils qui nous rendent un peu plus misanthropes - une petite anecdote, que dis-je, une parabole, que ne reniera pas mon ami philosophe jamon baptista del guadalquivir :
un fumeur raconte - la scène se passe dans un train
"la vitre est baissée. tout à coup, juste avant le signal de départ, deux dames arrivés au dernier moment entrent avec un petit chien et s'installent devant moi [...]. toutes deux pas mal de leur personne et d'un abord hautain; elles s'entretiennent en anglais. bien entendu, je continue à fumer; c'est-à-dire, j'y avais bien songé un instant, mais je continue à fumer, tourné vers la fenêtre dont la vitre restait baissée. le bichon est sur les genoux de la dame en bleu ciel, un tout petit bichon, pas plus gros que mon poing, noir avec des pattes blanches, une rareté. je reste coi. je remarque seulement que les femmes semblent fâchées, à cause du cigare évidemment. l'une d'elle me dévisage avec son face-à-main en écaille. je ne réagis toujours pas puisqu'elles ne me disent rien ! si au moins elles m'avaient parlé, m'avaient demandé de ne pas fumer; il existe tout de même un langage humain; mais non, elles se taisent. tout à coup, [...] la dame en bleu ciel m'arrache le cigare et le jette par la fenêtre.le train continue à filer, tandis que je la regarde, ahuri. une femme sauvage, positivement sauvage, à l'état absolument sauvage, bien que par ailleurs une belle femme, bien en chair, ample, grande, blonde [...]; elle me foudroie du regard. sans un mot, avec une politesse parfaite, avec une politesse pour ainsi dire raffinée, je tends deux doigts vers le petit chien, je le prends délicatement par la peau du cou et... hop-là, je l'envoie par la fenêtre rejoindre mon cigare. à peine a-t-il eu le temps de pousser un jappement..."
comme cela me fit du bien de lire cela dans l'idiot de dostoievski...

mardi 8 octobre 2013

centenaire

allez on va bien écouter encore une fois "milord" de la môme édith, dont la mémoire est d'ors et déjà entachée par la môme marion - un punk de mon temps de lycée (siècle dernier) me disait qu'elle aurait chanté du hard rock, ce n'est pas idiot, comme il n'est pas idiot de songer que les violons saturés de brahms annoncent le métal - je digresse - ta gueule - cinquante ans qu'elle est crevée la môme, pourquoi célébrer la mort ? 
alors que...
ma neuvaine de lecteurs de lecteurs (mais qu'importe la quantité, tant je sais que ce sont les justes) n'oublia point que nous fêtons le centenaire d'alcools de guillaume a. [ainsi devons-nous consommer cent bouteilles cette année] et de du côté de chez swann de marcel p. [ainsi devons-nous nous faire gruger par une petite centaine de cocottes, ou cent fois par la même ce qui est plus jouissif] et de les inviter à lire ou relire les deux merveilles de 1913... - 
c'est fait, comme disait huysmans à la fin de la préface d'à rebours; vous pouvez vérifier...  

samedi 5 octobre 2013

un libéral

une émission que j'écoutais il n'y a pas si longtemps - un entrepreneur fort libéral assène l'argument imparable : "sans les entrepreneurs, on vivrait encore dans des cavernes." - quand l'entrepreneur étaye son argumentation sur une connaissance fine de l'histoire, on ne peut que se taire ; l'entreprise nous fit sortir de nos cavernes obscures pour nous installer heureux dans des taudis -

vendredi 4 octobre 2013

insomnie

en solidarité avec tous les insomniaques, tous ceux qui souffrent d'excès de mémoire, petit extrait d'un livre dont j'ai oublié le titre mais que je crois avoir lu...
"qu'est-ce que notre insomnie, sinon l'obstination maniaque de notre intelligence à manufacturer des pensées des suites de raisonnements, des syllogismes et des définitions bien à elle, son refus d'abdiquer en faveur de la divine stupidité des yeux clos ou de la sage folie des songes ?"
mémoires d'hadrien, marguerite yourcenar