mardi 26 juillet 2016

tragédie

lucius, du fond de sa cave, me suggérait hier : "il y a toujours quelque chose de pathétique, voir de tragique, à se dire qu'à présent seul un miracle pourrait nous sauver..."
las de l'entendre je refermai la trappe -

jeudi 7 juillet 2016

crise de la quarantaine

bon sang, me suis-je dit au réveil, car je n'utilise plus le passé simple, quarante ans dont vingt-cinq de travers et plus de quinze à l'étranger (n.b. il arrive qu'on avance de travers à l'étranger) - "quinze ans d'afrique", avec ma peau tannée du soleil de tous les étés et mon physique de baroudeur chic, de quoi allez frimer auprès des petites frangines qui s'en battent l'oeil de mes fausses histoires car elles compulsent compulsives leur téléphone intelligent - 
my goodness, me suis-je dit, toutes ces années d'existence à peine utiles et je suis toujours aussi démuni devant l'effroyable concrétude - qu'on pardonne l'audace de mon néologisme, mais en cette période d'euro je manque de vocabulaire et j'ai perdu mon dictionnaire - de l'existence... 

mercredi 6 juillet 2016

ramadan

notre discours n'est pas heureux en cette période de ramadan - on se prendrait même, nous étrangers à ce pays, à vouloir le modifier à notre sauce, à notre regard, à nos intérêts. on peut évidemment déplorer le manque d'aménité de certains employés qui travaillent sous climatiseur. les réseaux sociaux relayent les bastons avant la rupture du jeûne, les accrochages sont nombreux sur les routes - il est, en outre, évident qu'un ouvrier sur un chantier sera disponible moins longtemps quand il ne peut pas boire et qu'il fait 45°C à l'ombre ; il est clair que tout le pays s'adapte à ce nouveau rythme disons... plus spirituel qu'économique - car c'est le maître mot - l'économie est en berne, et les liens familiaux, sociaux et spirituels ne pèsent pas lourds en nos temps sonnants et trébuchants. l'ère économique ne peut aimer le mois sacré, comme elle n'aime pas l'épisode neigeux et les poussières d'un volcan islandais - l'ère économique ne saurait aimer ce qu'elle n'est pas en mesure de soumettre.

pourtant, tous les soirs entre 18h30 et 19h, je circule dans mon petit quartier (populaire forcément, je vis au sein de la vraie population marocaine, je suis un intégré, je ne suis pas un expat', je suis dans le vrai dans le bon et dans le juste - je suis formidable et je m'admire d'être tel que je suis, et le quartier m'admire d'être ainsi, juste tel que je suis, moi (tellement moi) en somme...), parmi les marchands assis et desséchés, qui achèvent avec langueur et monotonie les conversations du jour, qui exécutent les gestes quotidiens avec lenteur, avec économie, parmi les hommes et les femmes qui font leurs dernières courses, choisissent les dattes, le lait caillé, le jus d'orange et les gosses qui seuls ont suffisamment d'énergie pour faire encore du bruit et des courses - dans l'attente fébrile, fragile que ne passe pas trop lente la dernière heure avant le f'tour - 
cette heure - au moment où l'atmosphère fraîchit et où le vent balaye les poussières, où les palmes frétillent et où quelques courageux entreprennent un footing, où les ombres s'allongent sur le rose pâle des murs et où le ciel va bientôt flamboyer (et mon énumération est foutue en l'air) - recèle d'une douceur presque infinie et inhabituelle, d'une patience bienveillante, d'une onctueuse mollesse, d'une chaleureuse torpeur : le murmure a remplacé les bruits - une invitation à la lenteur et à la réconciliation - avant de retrouver sa famille pour manger la datte et boire le verre de lait -